Des
émaux onctueux et denses, des formes finement tournées dans du
grès de Puisaye, le tout mis en valeur par des motifs abstraits, tel
est l'art de Helena Klug.
Brésilienne d'origine, son attachement à la Bourgogne remonte
à un stage à Ratilly, dans les années cinquante. Elle y
revient quelques temps plus tard comme monitrice, et rencontre alors son mari,
qui y organise des expositions. Parisiens d'adoption, ils retournent régulièrement
dans leur maison de campagne, en Puisaye. Helena Klug reste fidèle à
cette terre qui lui fournit une argile de qualité.
Aujourd'hui, cette céramiste
est réputée pour son enseignement des émaux, technique
qu'elle a élaborée avec Daniel de Montmollin, également
céramiste, et frère de la communauté de Taizé. Ses
couleurs sont riches et profondes, on les croirait issues d'une cuisson au bois
ou au gaz. Elle les obtient pourtant avec le four électrique, qu'elle
a apprivoisé depuis une douzaine d'années pour s'adapter aux contraintes
de la ville et de ses élèves. De sa gamme choisie de coloris -
noir, blanc, rouille, vert-céladon, elle aime à exploiter les
infinies possibilités. Avec ou sans motifs, la couverture est toujours
onctueuse, lumineuse et animée de vie. Ici le noir brillant est parsemé
de gouttes d'argent, tel les temmoku chinois du XIIe siècle. Là,
le délicat vert-céladon est irisé de traits, imitant la
fourrure de lièvre. Le "kaki", ou couleur rouille, est un tissu
d'infimes gouttes d'huile brunes. Le blanc, enfin, a le velouté de la
soie.
Sa recette ? Des cendres, du phosphore, du titane, du fer, qu'elle dose scientifiquement.
Une superposition de deux émaux posés par trempage sur biscuit
confère la densité chromatique qui caractérise ses pièces.
La couleur est parfois rehaussée d'une autre teinte : un simple liseré
qui épouse la forme, ou des motifs abstraits dessinés à
la paraffine. C'est la technique dite "en réserve", qui fait
ressortir l'émail du dessous par contraste.
Si le travail d'Helena Klug
demande de la méthode et de la rigueur autant dans l'apposition d'émaux
que dans le tournage, le décor semble pour elle un espace de liberté,
où spontanéité et imaginaire s'expriment à la
manière des calligraphes de l'Extrême-Orient. Habilement tournées,
ses formes sont façonnées pour servir : plats, vases, bols résultent
d'un même souci d'harmonie.
Du pied au bord, l'épuration de la ligne est recherchée à
la fois pour elle-même et pour mieux répondre à une fonctionnalité
voulue par la potière, qui se revendique avant tout artisan. Les beaux
volumes de ses bols émanent de la plénitude de l'espace intérieur
qui détermine la forme. Les vases ronds, les coupes évasés
ou les plats carrés rappellent que Helena Klug a eu pour maîtres
Bernard Leach et Tanimoto, tous deux attachés à une culture où
l'objet fait partie d'un art de vivre. Les céramiques d'Helena donnent
envie d'être utilisées, dans un univers où les mets, les
fleurs possèdent autant de valeur que ce qui les porte, où la
beauté s'immisce dans le moindre geste de la réalité quotidienne.
Delphine LAURENT Janvier 2000
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